Mercredi 24 août 2022, par 49°36 N et 07°57 W, 70 milles, dans l’Ouest des Iles Scilly.
Il est 3 heures du matin et je termine mon quart. Dehors, le vent souffle à 14 nœuds, le gennaker est à poste et nous faisons cap vers la Bretagne.
Il y a deux jours nous avons quitté notre port d’attache de La Trinité-sur-Mer pour un entraînement en direction de l’Irlande. Je ne connais pas la météo en France mais depuis notre départ nous sommes à la recherche du soleil ! En effet, lundi, au large de la Bretagne, nous avons passé l’après-midi dans un brouillard bien dense, à scruter le radar et l’AIS car nous n’avions pas de visibilité à plus de 300m. Nous avons à peine distingué Belle-Île, nous n’avons pas vu l’île de Groix et nous avons viré à proximité de la Basse Jaune des Glénan sans voir le moindre caillou. Autant vous dire que la croisière commençait mal, sans possibilité de voir les curiosités locales proposées par le tour operator. Nous sommes donc partis au large, dans l’ouest, direction les U.S.A. Après une nuit noire, le jour s’est levé avec un petit crachin rafraîchissant ! La pluie ne nous quittera pas de la journée.
Au fil des heures, le front s’est rapproché et le vent a accéléré, tout en adonnant, ce qui nous a permis de procéder à quelques changements de voiles à l’avant. J1 à rouler ; J2 à dérouler ; J1 à affaler et à ranger ; J0 à envoyer ; J0 à dérouler … De bon augure pour réviser les fiches de manœuvres et revoir nos gammes. Plus tard, le vent a atteint les 25 nœuds de vitesse. Nous avons ainsi pu hisser le Gennaker. Sails of change s’est alors dégourdi les flotteurs pour atteindre sa vitesse de croisière et se caler aux alentours des 32 nœuds, avec des pointes de vitesse à 39 nœuds. Le navire avançait bien. C’était pour nous le bon moment pour lancer des phases de test de 10 minutes : rake de safran à 0 puis à 1,5 ; rake de foils à 0; puis 1 ; puis 2 … Les combinaisons étaient multiples et toutes intéressantes à analyser.
Entre temps une alarme s’était mise à sonner ! Il y avait de l’eau dans la soute de la cuisine : une vingtaine de litres d’eau chaude et douce. J’ai alors retrouvé Benjamin Schwartz, notre navigateur, en train d’écoper. Je me suis alors demandé s’il n’avait pas simplement voulu se faire couler un bain … Il m’apprenait en fait que le chauffe-eau avait un défaut de fermeture. Le problème fut vite réglé !
Mais au fait, y a-t-il un pilote à bord de Sails of Change, pendant que tout le monde profite de la croisière ? Et oui c’est « Popol 2 », fils de « Popol », bien plus costaud. Benjamin, encore lui, nous expliqua que ce nouveau pilote avait un vérin deux fois plus rapide. En effet, alors que « Popol », premier de cette lignée, avait des faiblesses à partir de 38 nœuds, « Popol 2 » semble tout à fait apte à encaisser la pression. Un peu bruyant mais efficace, il apprend vite et barre très bien.
Le centre de la petite dépression que nous longions s’est rapproché et, au fur et à mesure que nous avancions vers l’Angleterre, le vent a tourné progressivement à gauche. Nous avons suivi son évolution et avons fini par faire un 3/4 de tour sans virer, ni empanner, les étraves pointées vers la Bretagne. Même si le vent n’était pas exactement dans le range d’utilisation de la voile, c’était une bonne occasion de rouler le J0 pour tester le petit gennaker et de continuer à travailler les manœuvres.
Désormais, il est temps pour moi d’aller dormir un peu. Dans trois heures, un autre croisiériste va vouloir ma bannette et il ne me laissera pas dormir ! Alors bonne nuit et à bientôt.
Xavier Revil